L'Anathème


Quarante troisième parution
 " L'Anathème".
#43, avril 2016, Le Havre, France
Éditorial: L'anathème, extrait de "ZENTE, 
suivis de "Ô grand arbre",  et les allumettes ...par E.A
Photo: C.L.M
Réalisation: C.L.M & E.A


©Photo: C.L.M
Éditorial: "L'anathème".

Il y a des soirs, le questionnement nous pointe tel un poignard pendu sur notre tête qui gueule un simulacre "non-sens". Et là! La brume, tel un bouclier, pose dans la nuit un goût errant, un éventail fait de galops de chevaux fanfares. La vie tangue dans les contretemps des vagues qui s'échouent aux cimes de nos galets chauves, pieds dans l'eau. Elle est comme ce que l'on croit voir dans un paysage, devant une fenêtre lamentant toujours la même vue [...]

***
Dehors, on voit passer les gens sans connaître une once de leur histoire; pourtant, nous arrivons à parler d'Histoire. Comment faisons-nous? Je me le demande. Nos vagues sont souvent, mortellement fébriles dans la danse d'un rêve déchu par la vulgaire arrogance des rois en mousse.

Extrait de "Zente", par E.A

                                      Au grand arbre

Ô Grand arbre, féru mendiant d'histoires passagères à raconter au vent...dompteur d'anciens hivers, conteur dérivé de la terre aimante, ton verbe prend toujours la forme d'un fruit que l'on déguste en tout temps;

Ô vieillard, toi qui tiens hymne du vacarme des moineaux, colibris, pies, pigeons, mouettes et goélands...sous ma fenêtre...

Tu regardes passer le monde à travers champs, piqué à l'envie pressante, à l'orgueil stérile, perdu dans l'espace sans fin des murmures sans nez, comme le mépris de ces chiens reniant les premiers coups de fouet pour l'amour du risque, pour l'amour d'un os mort.

Ô grand arbre de tous les temps, fils du soleil, toi qui sais si bien soumettre la neige, en la trouant avec ton ombre feuillue...grand chêne, rempart des songes poétiques des conteurs, le papier des heureux a maintenant ce goût d'encre mouillé...tout cela te laisse songeur, comme ce poète mangeur d'étoiles.

Tu te couvres des saisons pour allaiter, sans faille ni rancœur, tous ces cœurs désespérés dans la paille...ta parole est silence comme ton hymne est oisif...il nous faudra vivre ton songe, pleinement, pour espérer remonter le temps;

Ô grand arbre, tu as su garder en toi, de tout temps et malgré vents et  tant de mauvais temps, la mémoire de ta première feuille...

Grand mapou, la nuit te parle comme le jour te quitte...Les maîtres, après leur repas, viennent souvent perdre leur paresse dans ton ombrage; les amantes gorgées d'amour et de tendresse, aux seins pointus et excités, aiment tant se blottir contre tes branches pour penser en amour à leurs aimés damnés; le plus pauvre d'entre nous, à force d'écorchures aux pieds, orphelins des chaussures trouées, n'a hélas ni assez de souffle, ni assez de temps pour arriver jusqu'à toi...les rois meurent sans orgueil et réalisent souvent trop tard, bien trop tard, que toi seul sait véritablement comment enjamber le temps sans regret.

Et moi, ô arbre de nos vies, je t’épargne mes blessures...tu es immobile comme ta souplesse, fidèle et loyal comme le temps que tu gardes dans ton feuillage...il me revient de t'emmener au cœur de mon rêve où tu seras mon seul et unique arbre à vivre... 

Ô grand arbre, regarde moi cette forêt artificielle, antre de la hantise à l’érotisme asservie et des voyeurs pathétiques, où règne filles et fils de la discorde...même le vent qui s'y frotte te revient avec l'odeur de la panique; une panique de paille...

Ô grand arbre, fils de la terre au baptistère gazeux, tu n'héberges aucun loup dans tes contes...ils ont migré en ville, là où vivent aujourd'hui encore toutes ces fées jalouses d'Erzulie Freda; et où toute justice est fille du silence...


***

 Les allumettes

J'ai dans la poche
deux allumettes
une pour illuminer
l'espace millénaire
et une autre pour incendier
mon essence.



E.A


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